Afrique subsaharienne : comment aider les nouveaux producteurs de matières premières (FMI et AFD)
05 févr. 2014Des pays d’Afrique subsaharienne qui se développent sans ressources naturelles, c’est possible. Dans son dernier rapport sur « les perspectives économiques régionales », le Fonds monétaire international (FMI) a ainsi identifié six États avec une croissance économique supérieure à 5 % en moyenne entre 1995 et 2010 : Burkina Faso, Éthiopie, Mozambique, Ouganda, Rwanda et Tanzanie.
« Ces États ont enregistré des taux de croissance plus élevés que ceux des pays exportateurs de pétrole, le Rwanda présentant la pente la plus aiguë avec + 9,6 % devant le Mozambique, avec + 7 à 8 % par an depuis la fin de la guerre civile en 1992 », commentait Roger Nord, directeur adjoint de la division Afrique au FMI, lors d’un séminaire organisé le 3 février à l’Agence française de développement (AFD).
Paradoxalement, ces pays, qui étaient dépourvus de matières premières, ne le seront plus ou ne le sont déjà plus, puisque des hydrocarbures et des minerais y ont été découverts. « Au Mozambique, les réserves de charbon sont déjà exploitées depuis un an. Ce sont les premières dans le monde, après celles de l’Australie. Et ce pays d’Afrique de l’Est pourrait aussi devenir un des plus grands producteurs de gaz naturel », relève Roger Nord. Pour le représentant du FMI, « la bonne gestion de ces ressources sera donc cruciale » pour assurer un développement harmonieux dans ces pays.
Une étude de l’AFD pour combattre les « vulnérabilités accrues »
Parallèlement aux perspectives régionales de l’organisation internationale, l’AFD a fait réaliser par le cabinet IDL Group une étude complémentaire (qui n’est pas encore publiée en ligne), centrée sur le Ghana, l’Ouganda, la Tanzanie et le Mozambique, « tous apparus il y un an comme de nouveaux pays producteurs de matières premières », expose Yves Boudot (notre photo), directeur Afrique de l’agence publique française.
Le Ghana et l’Ouganda exploitent déjà un peu de leur pétrole, mais globalement, ces quatre nations ne retireront que dans un futur plus ou moins lointain les vrais fruits des découvertes d’hydrocarbures.
Le cas le plus emblématique est celui du Mozambique. « Il va falloir attendre dix ans. Reste, selon Yves Boudot, qu’il y a déjà une ruée du monde entier tirée par les investissements gaziers, avec des effets notables sur la sous-traitance. La spéculation immobilière se développe dans le capitale Maputo, on y voit déjà les prémices de l’accélération des investissements directs étrangers et il va y avoir un effort de construction d’infrastructures gigantesque ».
Mozambique : 82 % de la population avec moins de deux dollars par jour
Compte tenu de l’écart entre les périodes de découverte et de production des matières premières, l’AFD estime que les quatre pays étudiés présenteront des « vulnérabilités accrues ». C’est pourquoi, « pendant cette période de transition, nous allons continuer à les appuyer avec des prêts concessionnels, à soutenir leur secteur privé et leur agriculture, à aider les gouvernements à allier soutenabilité et financement de l’économie en participant aux grands projets nationaux », explique Yves Boudot.
Les risques « pendant cette période de vulnérabilité », sont à la fois institutionnels (capacités de gestion…), financiers et sociaux. La hausse des investissements devant logiquement entraîner une augmentation des importations, les équilibres budgétaires sont menacés.
Au Mozambique, par exemple, près de 82 % de la population vit aussi avec moins de deux dollars par jour. « La distribution des revenus y est insuffisante et si les pauvres en ont profité, les classes plus aisées en ont encore plus bénéficié », observe Roger Nord. Et donc, selon Yves Boudot, « il va falloir gérer les attentes ».
L’AFD a ainsi également l’intention d’appuyer les politiques de redistribution (assurance santé…) en Afrique.
source www.lemoci.com