NAMISGMA (Burkina Faso) (AFP) - mercredi 02 juin 2010 - 15h18 - A 63 ans, Salam et Idrissou ne songent pas à la retraite. Dans le nord du Burkina Faso, à Namisgma, ils creusent et cassent la pierre en quête d'or: malgré l'arrivée de grandes sociétés minières, l'orpaillage garde une place importante dans le pays.A plus de 200 km au nord de Ouagadougou, le village a des airs de camp de réfugiés. Il est sorti de terre "en moins de deux ans après la découverte de l'or", raconte à l'AFP Alassane Compaoré, chargé de la sécurité du site.Quelque 10.000 personnes vivent dans de MINE-D-OR-BF.jpgpetites cabanes de paille ou de tôle, au bas de la colline où le filon a été découvert en 2008.

 

"C'est le principal site d'orpaillage au Burkina", affirme le policier.Bravant les éboulements et la mort, les milliers de chercheurs d'or de Namisgma viennent de tout le pays, mais aussi de Côte d'Ivoire, du Mali, du Niger, du Nigeria et même du Cameroun.En neuf mois, "j'ai déjà obtenu quelque chose", dit Abdoul Karim Maïga, refusant toutefois d'indiquer le montant de son butin.A 32 ans, ce père de famille burkinabè fait figure de chef parmi les 13 ouvriers employés par Salam et Idrissou Ouédraogo.

 

Les deux sexagénaires à l'allure très modeste, venus d'un village à une cinquantaine de kilomètres de là, ont été les premiers à creuser la colline où ils ont découvert l'or."Si tu as un trou où il y a l'or, tu peux faire appel à des gens pour t'aider à creuser et faire remonter les blocs de quartz qui en contiennent", explique Salam.Pour la rémunération, ils partagent les blocs de pierre sortis des trous, concassés puis mis dans des sacs. Chacun croise les doigts en espérant y trouver sa fortune.

 

Les pépites sont vendues sur place à des négociants locaux pour 15.000 FCFA (environ 20 euros) le gramme."J'ai déjà acheté 50 sacs de mil de 100 kg à raison de 15.000 FCFA le sac, grâce à l'argent de l'or", se réjouit Salam à l'abri d'un hangar de fortune, alors que le thermomètre frôle les 47 degrés.Dans un pays où plus de 46% de la population vit avec moins d'un dollar par jour, les autorités tolèrent cette activité."En terme de revenus, l'Etat ne tire pas grand-chose de l'orpaillage. Mais s'il n'y avait pas l'orpaillage, où iraient ces milliers de jeunes désoeuvrés?", demande le ministre des Mines, Abdoulaye Abdoulkader Cissé.L'orpaillage occupe au moins 532.000 personnes au Burkina, où 159 des 270 sites ont été reconnus en 2010 par le ministère.

 

Les sociétés minières s'installent depuis quelques années.L'or, poussé par les cours mondiaux, a détrôné en 2009 le coton comme premier produit d'exportation du Burkina, qui a inauguré en 2010 sa cinquième mine.Mais la cohabitation entre orpailleurs et compagnies est conflictuelle."Nous avons mis trois ans pour convaincre les orpailleurs de partir de notre site, malgré le permis d'exploitation dont nous disposions", déplore Assane Ouédraogo, chargé des relations avec les communautés pour la société Essakane SA, qui doit prochainement démarrer sa production dans le nord.Les orpailleurs sont accusés de polluer les eaux par les industriels qui pointent l'utilisation "sauvage" et "incontrôlée" du cyanure et du mercure dans l'extraction opérée par ces chercheurs d'or.

 

Les intéressés n'ont que faire de ces reproches.Si les sites doivent bientôt fermer pour la saison des pluies, Salam et Idrissou sont formels: "nous reviendrons toujours".

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