Il y a seulement cinq ans, beaucoup d'investisseurs professionnels découvraient un nouveau Graal, les matières premières. Le long cycle haussier des ressources naturelles venait à peine de commencer. Interrogés alors par Barclays Capital, les intervenants sur les marchés financiers qui avaient participé à la première conférence annuelle de la banque d'affaires dédiée à ces produits déclaraient à près de 40 % que la bonne pondération pour cette classe d'actifs dans les portefeuilles diversifiés se situait entre 1 et 5 %. Allocation faible mais jugée à l'époque comme audacieuse tant les matières premières étaient considérées comme un placement risqué. Les marchés d'actions régnaient alors sans partage. L'argent coulait à flots. Et les investisseurs n'avaient pas encore compris le rôle que la Chine, mais aussi le Brésil, l'Inde et, dans une moindre mesure, la Russie allaient jouer dans la croissance globale.

Depuis, le paysage a changé. Puissantes pompes aspirantes de ressources naturelles vitales pour leur développement industriel, les BRIC ont résisté au choc du « subprime » et sont moins exposés que d'autres aux menaces qui planent sur la dette souveraine. « Un an après le moment où les attentes pour l'économie mondiale étaient au nadir, la poussière est retombée et la structure des marchés des matières premières, ainsi que les investissements dans les ressources naturelles, ont prouvé leur extrême robustesse », résume Kevin Norrish, chez Barclays Capital. Les opérateurs ont ainsi retrouvé l'appétit pour ces produits plus précocement que d'habitude après une récession. La moitié des plus de 250 spécialistes des marchés qui ont participé au début du mois à Barcelone à la conférence 2010 de la banque britannique ont considéré que la place de ces placements dans les portefeuilles est entre 6 et 10 % du total. Quelque 29 % d'entre eux ont fait preuve de davantage d'optimisme en leur réservant plus de 10 % du total des actifs financiers diversifiés.

Produits sophistiqués

La familiarisation avec les matières premières avance à grands pas. Aujourd'hui, les professionnels de la finance demandent des produits sophistiqués et s'engagent dans des gestions plus « proactives » que par le passé quand les instruments les plus prisés étaient des indices traduisant uniquement des positions longues. Environ 45 % des présents dans la capitale catalane à l'appel de Barclays Capital ont accru leur exposition aux ressources naturelles en 2009 et 92 % d'entre eux, un véritable plébiscite, projettent de maintenir ou de renforcer leur présence dans ces actifs. Pour mémoire, l'an passé, les flux nets de capitaux dirigés vers les matières premières ont atteint le niveau record de 70 milliards de dollars. En 2010, ils devraient être égaux ou supérieurs à ce montant pour 64 % des invités à la conférence de Barcelone. Seules véritables craintes : la détérioration des fondamentaux de ces marchés (41 % des répondants), des rendements négatifs lors des échéances contractuelles et l'impact négatif d'une régulation plus stricte (25 % ex aequo). Les produits les plus prisés par les investisseurs sont, dans un ordre décroissant, les platinoïdes (23 % d'entre eux) ; le cuivre (16 %) et le fret maritime (15 %).

M. P., Les Echos
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