Parmi les matières premières appelées à prendre de l'importance dans les années qui viennent, le lithium déchaîne les plus forts appétits. Les opérateurs y retrouvent en effet les ingrédients d'un cocktail haussier bien connu :

- une rupture technologique qui impose, en l'espace de quelques décennies ;
- une ressource méconnue comme stratégique ;
- une répartition très inégale des réserves, avec des menaces de tension sur l'offre ;
- un marché aux mains d'une poignée d'acteurs...
- et des conflits politiques.

Du cobalt au lithium
Ce point sectoriel prolonge en fait celui du Matières à Profits numéro 26 : j'y abordais déjà l'industrie des batteries, mais en me concentrant sur le cobalt. Complétons-le par le cas du lithium, filière reine en la matière...

Les technologies à base de lithium − lithium-ion (Li-On), mais aussi lithium-polymères ou lithium-phosphates − sont les plus performantes aujourd'hui en matière d'accumulateurs : ce sont elles qui permettent les batteries les plus légères, et les plus énergétiques.

Le secteur automobile certes, mais pas seulement !
Le lithium a d'autres applications. Gardez à l'esprit qu'à ce jour, 60 à 70% du lithium commercialisé sont encore réservés à d'autres industries telles que le verre et la céramique, les lubrifiants, l'aéronautique, la pharmacie. Mais c'est bien le secteur des batteries, dans un contexte d'une révolution annoncée du secteur automobile, qui suscite les convoitises.

Beaucoup d'incertitudes pèsent...
Bien entendu, beaucoup d'inconnues pèsent sur le potentiel de ce relais de croissance. L'électrification de l'automobile mondiale aura-t-elle lieu ? Serait-elle viable − par exemple, dans un pays comme l'Inde, qui dépend majoritairement du charbon pour son électricité ? Le lithium jouera-t-il un rôle dans les futures générations de batteries ? Et y en aura-t-il assez ?

Certains ont déjà pris les paris. Parmi eux, des visionnaires comme Bolloré.

Les ressources économiquement exploitables sont rares...
Le lithium n'est pas vraiment rare : il en existe de vastes quantités. Mais son extraction serait coûteuse. Les ressources mondiales ne sont pas encore bien connues − les prospecteurs s'en donnent d'ailleurs à coeur joie −, et si l'on parle de réserves prouvées, en concentration suffisante, aptes dès aujourd'hui à une exploitation rentable, l'éventail se resserre singulièrement.

On trouve essentiellement le lithium sous deux formes : dans des silicates contenus par certaines roches dures magmatiques (les pegmatites), comme dans les gisements d'Amérique du Nord ; ou bien dissout dans les saumures piégées par les croûtes des salars, comme à Atacama au Chili.

La liste des ressources commercialement rentables est vite dressée
Pour les pegmatites, les grands gisements sont en Australie, au Canada, au Zimbabwe. Quant aux salars, qui représentent le plus gros des réserves exploitables connues et, surtout, 75% de l'offre mondiale, ils se partagent entre la zone andine (Chili, Argentine et Bolivie) et la Chine, qui a découvert au Tibet des gisements assez conséquents, mais sans commune mesure avec les réserves du "triangle andin".

La Bolivie, nouvel Eldorado du lithium
Le Chili est aujourd'hui le premier producteur mondial et son lithium, exploité depuis bientôt 10 ans, est le moins cher au monde. L'Argentine a des réserves moindres et un peu moins compétitives (la concentration y est un peu plus faible). En Bolivie, l'exploitation commence − et c'est pourquoi le pays fait figure de véritable Eldorado du lithium.

Ajoutez à cela que le marché mondial est dominé par quatre sociétés seulement, et vous tenez un formidable aimant à spéculateurs !

Retour à l'accueil